A
entendre (ou plutôt à lire) cette expression, oreille absolue, on se
croirait plongé dans un roman de science-fiction… L’oreille absolue
est-elle un super-pouvoir ? En tout cas, le mystère demeure sur la
manière dont elle se développe…
Etat des lieux de ce que l’on peut affirmer (ou supposer) sur cette intrigante capacité musicale, sous forme de "vrai ou faux". «
Celui ou celle doté(e) de l’oreille absolue peut associer n’importe
quel son à une note : le bruit d’une sonnette, le bip d’une touche de
clavier, le vrombissement du micro-ondes… » VRAI.
C’est donc ça, l’oreille absolue : la capacité à identifier chaque
hauteur de son, sans aucune référence préalablement donnée. Sans aucune
autre note repère. La tonalité du téléphone fixe ? Un La. La sirène des
pompiers ? Si - La, Si - La.
Autre célèbre et impressionnante démonstration du pouvoir de l’oreille absolue : la retranscription du Miserere d’Allegri par Wolfgang Amadeus Mozart. En 1770, le jeune compositeur voyage avec son père à travers l’Europe, et tous deux assistent à une représentation du Miserere, au Vatican.
A
cette époque, l’oeuvre vocale de Gregorio Allegri est encore
jalousement protégée par le Vatican : nul n’a le droit de la reproduire
ou de la diffuser en dehors de ses murs. Peu importe au jeune Mozart,
alors âgé de 14 ans et qui, le soir même de son écoute, retranscrit le Miserere
de mémoire… Une oeuvre pour deux chœurs, à neuf voix. Mozart avait donc
l’oreille absolue (il a identifié et mémorisé chaque note), mais il
était aussi tout bonnement génial ! « Avoir l’oreille absolue, c’est avoir de supers oreilles » FAUX.
Tout se joue dans le cerveau ! Exactement comme pour la perception des
couleurs : c’est bien notre petite tête bien faite qui identifie et
interprète l’information envoyée par nos yeux, et nous fait dire, par
exemple, que le ciel ou la mer sont bleus.
C’est la même chose
pour les hauteurs de son : elles sont perçues par nos oreilles mais
traitées par notre cerveau. Or, pour celui ou celle qui a l’oreille
absolue, le traitement de cette information sonore est automatique :
chaque son est aussitôt associé à une hauteur de note mémorisée. Tandis
que pour tout autre individu, l’identification d’une hauteur du son
nécessite un travail, un effort de comparaison avec une première note
donnée.
Pour une personne dotée de l’oreille absolue, la musique
est comme un second langage. De la même manière qu’elle comprend
immédiatement chacun des mots qu’elle a assimilés enfant, il ou elle
nomme naturellement chaque son.
La
famille Bach est certainement la plus musicienne de toute l'histoire
occidentale. En sont issus nombreux compositeurs et organistes dont le
plus célèbre, Jean-Sébastien Bach, dont quatre des fils furent aussi
musiciens.« On peut avoir l’oreille absolue sans le savoir » VRAI.
Et c’est logique. Puisque pour ‘prouver’ que l'on a l’oreille absolue,
ou le comprendre soi-même, il faut connaître le nom des notes, être
capable de nommer ce que l’on entend.
Certaines personnes
possèdent ainsi une oreille absolue sans le savoir, parce qu’ils n’ont
jamais appris la musique ou parce qu’ils y ont été initiés trop tard.
Leur capacité à identifier une hauteur de son est excellente, absolue,
mais ils ne maîtrisent pas suffisamment le langage musical pour s’en
rendre compte. « Celui ou celle qui possède une oreille absolue chante nécessairement juste » FAUX. Eh oui ! Ce n’est pas la même chose de reconnaître une note que de la reproduire vocalement. Ecoute et chant ne sollicitent pas les mêmes mécanismes.
De plus, rien ne garantit à l’heureux porteur d’une oreille absolue que
sa voix soit belle, agréable à entendre (mais ça, c'est une autre
affaire).
Il s’agit là de la différence entre “oreille absolue
passive” et “oreille absolue active”, mise en avant par des études
anglo-saxonnes. Celui qui a une oreille passive ne peut que reconnaître
les notes (et c’est déjà pas si mal), tandis que celui qui a une oreille
active est capable, en plus, de les chanter. De donner le la, en quelque sorte. « Celui ou celle qui a l’oreille absolue est meilleur(e) musicien(ne).» FAUX.
Faux. Faux. Archi-faux. La majorité des compositeurs, instrumentistes
ou chanteurs ne la possèdent d’ailleurs pas. La véritable oreille dont a
besoin un musicien est l’oreille relative, soit la capacité
d'identifier une note par rapport à une autre donnée, dans un ‘contexte
harmonique’. L’oreille relative fait appel au mécanisme des intervalles :
je reconnais le Ré qu’on me joue au piano si on m’a précédemment fait
entendre un Do, un La ou toute autre note de la gamme.
C’est
l’oreille relative qui permet à l’instrumentiste de s’accorder avec les
autres membres de l’orchestre, au chanteur de s’adapter aux autres voix
ou à l’accompagnement. C’est aussi l’oreille relative que l’on entraîne
et développe en cours de solfège, pendant les fameuses dictées de notes.
Bref, la bonne nouvelle, c’est que cette oreille relative s’acquiert,
se travaille ! Nul besoin, donc, d’avoir l’oreille absolue.
Wolfgang
Amadeus Mozart (1756 - 1791). Il avait l'oreille absolue, mais est-ce
seulement grâce à cette capacité qu'il s'est rendu célèbre ? Non,
évidemment, car ses compositions sont un savant mélange de notes, de
rythmes et... d'inspiration « Le pourcentage de personnes possédant une oreille absolue varie selon les pays » VRAI.
Le pourcentage de personnes possédant l'oreille absolue varie selon
leurs langues natales. Ainsi, les langues tonales, telles que le
mandarin, le thaï ou le vietnamien, facilitent le développement d’une
oreille absolue.
Car dans une langue tonale, la hauteur des sons
fait partie intégrante de la prononciation. Pour respecter le sens d’un
mot, il faut aussi respecter la hauteur de sa voyelle, lui donner la
bonne intonation. Par exemple, en mandarin, la syllabe ma peut être prononcée de quatre manières, l’une voulant dire cheval, les autres insulte, chanvre ou… mère. Mieux vaut, donc, adopter le bon ton ! « Avoir l’oreille absolue ne comporte que des avantages » FAUX. C’est un peu comme pour tous les super-pouvoirs, gare au revers de la médaille…
Oui,
ceux qui possèdent l’oreille absolue retranscrivent facilement une
mélodie, peuvent corriger les malheureux responsables de fausses notes
et, admettons-le, crâner un peu.
En revanche, le son d’un
instrument mal accordé leur est insupportable. Ils ont aussi beaucoup de
difficultés à changer de diapason (soit à changer de La de référence) :
un air baroque interprété en La 415 (plus bas que le La 440 utilisé
dans les compositions d’aujourd’hui), leur paraîtra faux, bizarre.
Difficile aussi de jouer d’un instrument transpositeur : c’est en effet
une véritable torture pour une oreille absolue de jouer une note, un Do
par exemple, et d’en entendre finalement une autre, un Si, Fa ou Mi.
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